[…]

15h20 – 10/10/2021
Appartement Un bout du monde, 10e étage,
38100, Grenoble.

Je vous écris depuis Un bout du monde. Un nouvel espace que cette fois-ci j’occupe seul*. Deux pièces. Une pour vivre ou dormir et l’autre pour travailler. En réalité je fais les mêmes choses dans les deux. La seule différence c’est que l’une a une cuisine et l’autre, de grandes étagères remplies de papiers.

Être à l’ouest, au bord de la ville. Un nouveau de point de vue et un étage en plus. J’arpente la ville par d’autres chemins. Les habitudes se déplacent mais le soleil disparaît derrière les mêmes montagnes.
Je n’habite plus avec mes colocataires, mais nous vivons toujours ensemble. Certaines manières de faire sont restées, d’autres se transforment au fil du temps. Un quotidien en chantier. J’apprends à trouver un rythme, mon rythme. Se retrouver seul* après cinq ans de vie collective. Une digestion longue qui dure depuis plusieurs mois. Une respiration qui se poursuit. Nous avons grandi ensemble. Nous avons appris les un*s des autres et ça continue, autrement. Nos chemins se croisent, s’écartent et inversement, une cartographie qui suit son temps.

Face à face avec les montagnes.
Face à face avec moi-même.

Trouver un équilibre entre. L’individualité et le collectif. Les savoirs que l’on apprend et ceux que l’on transmet. Les temps d’action et de repos. L’énergie qu’on absorbe et celle qu’on diffuse. Être une plante. Capter le soleil, communiquer par les racines. Trouver sa forme et entrer en résonance avec celle des autres.

Dans cet appartement, je retrouve une place.
Je l’agence en fonction de mes besoins, de ce qui me traverse. Des espaces qui se précisent au fil des jours. Les sirènes et les klaxons des voitures décomposent le temps. Je m’inscris – faire corps – dans un ensemble. J’habite mon corps comme une maison. J’apprends à parler d’une voix nouvelle, plus grave. Les traits qui bougent, dessinent un visage plus large. Le regard ne change pas. Appréhender ce qui perdure vis-à-vis de ce qui se transforme. Être à l’écoute, attentif* aux détails.
Dans les cartons, des fantômes. Je les déballe au fur et à mesure. Combiner ce qui s’est passé et ce qui se fait. Des cagoules aux murs. Son visage, le mien et celui de tant d’autres. Je me raconte de nouvelles histoires.

Des outils, j’en ai pleins les poches mais elles ne cessent de grandir.